Hexagrammes 17 et 50 : guider ou être guidé par la méditation
(par Guy H)


En complément à l’article «Hexagrammes 48, 49, 50 : comment passer de l’eau au feu ?», voici deux hexagrammes racontés par mon ami Guy H, qui propose depuis quelque temps ses hexagrammes du jour à lire sur le forum Izazen Garden (il expliqué sa démarche dans le Préambule). L’idée est belle et en accord avec le principe de l’impermanence, puisque Guy a décidé que ces hexagrammes ne resteraient en ligne que deux jours ; ils disparaissent ensuite avec les commentaires qu’ils ont éventuellement générés.

Avec l’aimable autorisation de Guy, je reporte ci-après l’une des situations qu’il a ainsi mises en mots à sa manière, en s’appuyant sur plusieurs versions différentes du Yi King (sa bibliothèque en ce domaine est impressionnante). Ce sont ses « hexagrammes du jour » du 2 février 2011. Je conserve la présentation centrée qu’il choisit habituellement, d’autant plus que si la forme suit le fond, cet alignement est plutôt de bon augure !

 

17 suivre et 50, le chaudron

Belle association  que suivre et chaudron.

17 Suivre : hexagramme et idéogramme

17. Suivre.  En chinois SUI .

Les mots : loyauté – adaptabilité – coopération – confiance – fiabilité – sensibilité aux autres – service – obtention de conseils.
Mais aussi :
Suivre, se conformer à.
Suivant, selon, d’après, conformément à.
Au gré de. Au fur et à mesure, etc.

Autres symboles :
Découper de la viande de façon rituelle – se laisser glisser, se faufiler dans les interstices – accompagner un mouvement – sans motif, sans cause, sans précédent.

Le Ricci : conformité au déroulement, moment où l’on s’insère dans le développement universel.

Tonnerre en trigramme du bas et Brume ou lac en haut.
Le Tonnerre est mouvement et la brume détente, calme du lac.
Le Tonnerre , c’est l’Est, l’éveil, l’aube, le printemps.
Il enclenche les processus qui poussent à conquérir le monde,
il est la fougue qui cherche à le faire sien, à y trouver sa place.

La brume vient de l’Ouest et nous parle du soir.
Elle annonce l’automne et invite au repos, elle induit le facile,
le doux, le bienfaisant, le naturel et la grâce.

De l’aube au crépuscule, qu’advient-il de l’élan ?
Est-il un emportement
ou trouve-t-il enfin un peu de fluidité et d’aisance.

Impétueuse la volonté – poussée par le désir de la découverte –
bataille, tâtonne,
travaille les ingrédients d’une maturité future.
Arrive un temps où l’effort n’est plus de mise,
où c’est en lâchant prise que l’on trouve confiance et
évolue un peu plus souplement.
Comme si le mouvement conduisait à une allure plus simple,
plus ouverte, plus diffuse,
comme si l’impulsivité le cédait à cette légèreté
qui permet aux forces de s’assembler librement.

SUI
Il y a une image dans  SUI  qui déconcerte
mais allons pas à pas avant de suivre.

Une colonne de remparts, des pas, une main gauche,
une équerre et un croissant lunaire.

Nous sommes dans une grande ville (un rempart).
La main sur l’équerre est symbole du travail surmontant
une tranche de viande.

C’est le boucher, au travail répugnant,
mais qu’il doit cependant accomplir chaque jour,
tout au long de sa vie.

Au milieu de l’idéogramme, on voit le pied qui laisse des traces,
indiquant ici une marche lente
( tonnerre – la marche – et brume s’exprime la lenteur)
pénible mais inexorable.
SUI est la soumission (d’une marche), suivre.

Si ces pas sont imagés par trois, ces trois pas mesurent l’univers.
Ce que nous aurons à suivre et vaincre, trois mondes en trois étapes :
la terre ( sur laquelle nous reposons)
le monde intermédiaire (notre pensée explorera)
ensuite le ciel (monde pas si au-delà du temps) !

Nous aurons alors un instrument utile, l’équerre
dominant un croissant lunaire entièrement visible :

« La lune symbolise le temps qui passe
dont elle est la mesure par ses phases successives et régulières.
Elle est l’instrument de mesure universelle

L’astrologie chinoise très ancienne était lunaire,
elle voyait le Temps.
Alors, avec ces pas à faire en compagnie
d’instruments utiles…
on peut suivre en toute sérénité nos objectifs.

L’homme de bien ne craint pas l’obscurité car
il connaît la valeur de l’abandon :
après les difficultés des premières expériences survient
une phase où la conscience claire s’estompe et renonce à ses prérogatives.

Le vouloir laisse alors place à une activité plus fluide, plus relâchée, et ainsi plus entière.

Alors qu’une impulsion a été donnée, suivre c’est savoir abandonner le volontarisme et
laisser le mouvement se poursuivre de façon naturelle.
C’est faire le pas nécessaire pour s’insérer dans un courant porteur.

C’est ce qui se produit lorsqu’un apprentissage
a été mené à bien :
les éléments nécessaires ayant été intégrés,
l’activité est en mesure de s’exercer par elle-même,
sans que nous ayons davantage à intervenir.

Nous ne cherchons plus à contrôler, nous avons confiance.

Jean-François Billeter ajoute :

« L’oubli est lié à la maîtrise,
il se produit lorsque les forces profondes prennent le relais :
la conscience peut oublier
de diriger les opérations comme elle le faisait jusque là,
et s’oublier elle-même. »

J’aime bien ce suivre, il en vient
même à nous donner une méthode
pour déployer nos connaissances acquises…
puis après de nous permettre d’enseigner !

Les oiseaux, comment apprennent-ils à voler ?
En s’élançant dans le ciel en totale innocence ou innocence confiante ?

Voler dans le Ciel comme une libération, voilà qu’un tel guide
s’y emploiera avec abondance.

Cependant la souplesse sera mise à l’épreuve,
le guide original de ce jour préconisera de suivre avec un certain non-agir.
Un non-agir idéal, abondant

est celui qui nous dirigera dans la sérénité.
Un certain équilibre se doit d’être maintenu pour franchir des obstacles,
ceci par un guide prêt à modérer,
non pas ses émotions mais sa sensibilité aux autres.
Il le fera en ayant chaudronné auparavant.
Ayons joie ce matin de  » mijoter  » avec nos capacités, notre chaudron.

50 Chaudron : hexagramme et idéogramme50, le CHAUDRON.

Les mots : alchimie intérieure – maîtrise – renouveau spirituel – réceptacle – rajeunissement – sagesse discriminante –
Mais aussi:
Vase tripode qui servait pour les offrandes et les sacrifices.
Vase rond ou rectangulaire à trois ou quatre pieds pour la cuisson des aliments ou offrandes rituelles, marmite, chaudron.

Autres symboles :
Chaudron – marmite – outil de communication entre les dimensions et les générations – lieu d’échange entre les morts et les vivants – une grosse casserole sur le feu – appeler le nouveau.

Le Ricci : le chaudron dans lequel les aliments se laissent
transformer pour s’élever en offrande vers le Ciel
et devenir la nourriture du sage ;
moment où le faible s’élève vers le fort en s’y conformant,
assurant la marche vers le succès.

Il est dit que ce qui pénètre dans un chaudron en ressortira transformé,

mais ne pourra plus revenir à son état antérieur,
ce qui signifie que les éléments de la situation subissent
une transformation définitive, mais bénéfique,
puisque l’objectif est d’alimenter la situation et ce qui la compose.

Notons que lorsque nous faisons une recette (culinaire par ex)
nous y mettons les ingrédients puis les cuisons,
nous surveillons cette cuisson et
nous la stoppons au bon moment, ensuite on procède au partage.

Qu’est-il nécessaire au chaudron
afin de pouvoir expulser les fumées et les vapeurs symboliques
qui sont dues aux transformations ? (qui se produisent à l’intérieur)…
de la «percée» ou résolution,
il faut être résolu pour expulser tout ce qui pourrait
porter préjudice à la finalité de la recette.

Cet outil que chacun possède et qu’il développe plus ou moins
dans son quotidien a été imagé
dans l’ancienne Chine comme un trépied ou vase sacrificiel avec des « oreilles »
pour le porter. Il a été le symbole d’un événement heureux
car c’est dans les grandes occurrences que ce vase était utilisé.

N’est-ce pas aussi par les  « oreilles »
que nous transportons des sons aux idées ?

Ce chaudron représente une mise au monde,
une expression de votre propre vision et créativité
qui s’élève du plus profond de votre être.
Vous êtes prêts (prêtes) à donner naissance à un rêve
qui a pris forme en vous pendant un certain temps.

Et pour conclure une belle sentence, le chaudron
est le symbole d’une transmutation,
d’un passage à un niveau supérieur
qui s’opère en fondant du nouveau à partir des exemples d’adversité anciens.

Se maintenir avec patience et confiance
par un processus de méditation dotera celui, celle qui « chaudronne » d’une donne supplémentaire pour appréhender le présent.


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(par Guy H)”

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