Le brûle-parfum ou tentative de lecture énergétique d’un objet


Brûle-parfumUn ami m’a offert un brûle-parfum qui vient de trouver sa place – provisoire, il va de soi. En cherchant à arranger la composition décorative à laquelle il contribue, j’observai que les cinq éléments étaient presque réunis en lui :

Les 5 éléments (énergétique chinoise)Le feu, évidemment (la bougie).

Le métal : l’arceau métallique.

La terre : les petits cailloux et la céramique de la coupelle supérieure.

L’eau, contenue dans la coupelle.

Il ne manquait vraiment que le bois et au départ je ne l’ai pas trouvé. Et puis en réfléchissant, je me suis dit que le genre de parfum utilisé ici, par sa nature (huiles essentielles extraites de végétaux), correspondait à l’élément bois.

Chacun des 5 éléments est ainsi représenté au niveau formel (on serait donc dans un système de comparaison, selon la distinction proposée précédemment qui associe les similitudes de forme à la comparaison, de symbole à la métaphore, et de sens à l’analogie). Je ne savais trop quel élément attribuer à la pierre synthétique, sorte de résine, du support principal. Finalement, s’agissant d’un objet manufacturé, produit de l’industrie des hommes, on peut l’associer à leur travail (élément terre) mais aussi à leur créativité (élément bois).

Curieusement, au moment de prendre la photo qui illustre cet article, une fois que j’eus décidé de l’écrire, ce qui m’a semblé le plus heureux pour servir de fond à l’objet (et donc à l’image) fut un petit set de table en bambou (élément bois, comme si naturellement, la main trouvait ce qui est le plus adapté pour équilibrer la composition, certes au niveau visuel mais aussi au niveau énergétique).

Ouf. Le mental (celui du 6e élément, le feu de la terre)  se met sur pause.

Alors, dans ce silence relatif, en mettant en place l’objet, la figure d’un hexagramme apparaît : le feu sous une quantité limitée d’eau en train de s’évaporer (donc le trigramme de la brume ou du lac plutôt que de l’eau). Or « Le feu en bas, le lac en haut », il en a été question récemment : dans ce même article intitulé « Hexagrammes 48, 49, 50 : comment passer de l’eau au feu ? », la figure de l’hexagramme 49 (la Révolution, la Mue) est ainsi décrite et on y a associé l’image symbolique (par métaphore) du passage (entre l’eau et le feu) et, par extension, de l’âme, dans une vision tripartite de l’homme (corps, âme, esprit).

Poussant ma réflexion un peu plus loin, je m’interrogeai alors sur les prolongements sémantiques des différentes parties de cet objet, par-delà les correspondances de forme. Car si « l’utilité vient de l’être, l’usage vient du non-être » (cf. chapitre 11 du Tao Te King de notre hypothétique ami Lao Tseu) ; à l’inverse, m’interrogeant sur l’usage de l’objet, j’en suis venue à supposer d’autres associations possibles avec les 5 éléments, en particulier en ce qui concerne le métal, présent plus subtilement au travers de l’olfaction, sens qui lui est attribué ; présent aussi au travers du processus de passage de l’eau au feu (cf. une fois encore l’article sur les hexagrammes 48, 49, 50) ; car, si dans le modèle systémique des 5 éléments, c’est au niveau du feu (plus précisément entre le bois et le feu) que se fait le saut disons quantique qui permet à la spirale de la vie de s’élever, on peut se demander ce qu’il reste ici et de l’eau et du feu, une fois que la bougie s’est consumée, l’eau évaporée et le parfum avec. A priori : il reste de la terre et du métal, pour ce qui est de la forme – et finalement, sur un plan plus subtil aussi, car passé le plaisir olfactif (élément métal) lié à la combustion, il reste tout au plus, pour l’utilisateur, une forme de bien-être affectif (élément métal), éventuellement doublé d’une satisfaction décorative liée à la présence d’un joli objet (élément bois). Au niveau énergétique, l’objet semble donc renvoyer plutôt à une problématique Bois/Métal qu’à une dialectique Eau/Feu.

Pour aujourd’hui, donc, s’il s’agissait de rapprocher ce joli brûle parfum de la métaphore du passage, de l’âme, etc., on aura fait maigre récolte, car manifestement il ne reste pas grand chose de la transformation de cette eau et de ce feu : nulle transmutation de l’ancien au nouveau, et rien de neuf, que du consommable à renouveler sans autre horizon que sa disparition annoncée dès l’origine. Aucun changement en vue. On restera ici sur le terrain du jeu des seules comparaisons formelles (on aurait pu s’amuser aussi avec les formes circulaires de l’objet, leur orientation et leur imbrication), car la métaphore même ne semble pas nous mener bien loin. En conclusion, on pourrait dire que ce développement est un bon exemple de ce que la pensée analogique n’est pas ! et nous renvoie à nos classiques : peut-être bien qu’en effet « l’univers n’est qu’une idée et le monde entier un cheval » (cf. Tchouang Tseu).

Une piste (systémique) à explorer toutefois, une question qui concerne l’organisation des 5 éléments au travers des 64 hexagrammes du Yi King : comment l’élément métal y est-il représenté ? Mais comme l’écrit Michael Ende dans son Histoire sans fin : « Ceci est une autre histoire, qui sera contée une autre fois ».

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A propos du feu : Art Antérieur propose un atelier d’expression artistique (approche gestuelle et interne du dessin dans le cadre du projet Art et Mouvement – Dessin) sur le thème « Le feu qui éclaire », samedi 15 janvier 2011 de 14h30 à 18h à Avignon. Plus d’infos sur ce lien.

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Enfin, en guise d’étrennes, un rappel d’orthographe (la forme étant en résonance avec le fond, soignons-la !) : on écrit « un brûle parfum » avec ou sans trait d’union, et au pluriel seul « parfum » prend un « s », le premier terme résultant d’un verbe substantivé. Bonne année !

Je ne sais pas quoi vous souhaiter, car il me semble que tout est là quand, nos bavardages capitulent. Chaque geste est alors l'esquisse d'un pas de danse, le premier mouvement d'un tableau ; et les mots sont fleurs du silence. Retour au temps intérieur.


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